7 septembre 2025
L’essor de la viticulture wallonne n’est plus à prouver. Le nombre de domaines a triplé en une décennie (source : SPF Economie), dépassant la centaine. L’agriculture paysanne, de son côté, mise sur la diversification et le circuit court. Le fil conducteur ? Consommer mieux, valoriser les saveurs, préserver l’environnement. Résultat : associations, coopératives et initiatives émergent pour marier les deux mondes.
Ce contexte encourage des collaborations inédites, fondées sur la confiance, la transparence et la complémentarité des savoir-faire.
Premiers à s’engager dans le rapprochement, plusieurs collectifs wallons misent sur la coopération entre producteurs locaux et vignerons.
La Coopérative Vin de Liège, pionnière du vin bio en Wallonie, a misé d’emblée sur une démarche éthique et collective. Plus de 2.000 coopérateurs soutiennent le projet – un chiffre rare pour un vignoble belge. À travers son magasin à la ferme, la coop propose systématiquement les vins du domaine associés à des produits fermiers partenaires.
Une philosophie que l’on retrouve également du côté de la Coopérative Cense du Mayeur, où éleveurs, maraîchers et vignerons chaînent synergies et événements collectifs, souvent dans une logique zéro pesticide et faible empreinte carbone.
Fédération emblématique de l’agriculture bio, Nature & Progrès Belgique orchestre régulièrement des journées « Vins & Terroir wallon », réunissant producteurs fermiers, brasseurs, et vignerons issus de l’agriculture biologique ou biodynamique. L’édition 2023, organisée à Namur, a rassemblé plus de 1.200 visiteurs et une quarantaine de producteurs (source : Nature & Progrès Belgique).
L’avènement du digital offre un nouveau terrain de jeu pour les synergies entre vignerons éthiques et agriculteurs. Ce sont plusieurs plateformes collaboratives, essentiellement en ligne, qui facilitent le rapprochement ainsi que la visibilité des produits issus des deux mondes.
La Ruche qui dit Oui ! a essaimé en Wallonie une dizaine de points relais, où des vignerons engagés sont venus s’ajouter aux classiques producteurs de légumes et de fromages. Le concept va au-delà du marché : des “Paniers Accords” sont proposés chaque semaine, soigneusement pensés par des animateurs passionnés.
Lancé en 2021 avec le soutien de l’APAQ-W, Oh My Wallonie! cartographie et promeut une sélection pointue de producteurs durables, dont des domaines viticoles responsables. Les utilisateurs composent en ligne leur “parcours d’accords parfaits” : vins bios, charcuteries fermières, légumes oubliés, le tout livré ou à retirer dans des points relais.
Des solutions inspirantes pour pallier l’éclatement traditionnel des circuits courts, renforcer l’attractivité des produits responsables et éduquer au goût.
Impossible de parler d’initiatives collectives sans évoquer les événements qui transforment la rencontre producteurs-vignerons en moment de convivialité et d’éducation gastronomique.
De plus en plus de villages wallons organisent aujourd’hui leur propre Fête du Vin. Les plus emblématiques ?
Au-delà de la dégustation, ces événements favorisent l’échange direct producteur-consommateur, tout en sensibilisant le public aux enjeux environnementaux des circuits courts.
L’Agence wallonne pour la Promotion d’une Agriculture de Qualité (APAQ-W) pilote le festival Mangeons Local chaque année à l’automne. Des ateliers d’accords “faits maison”, orchestrés par des duos agriculteur-vigneron, y mettent en avant :
Selon l’APAQ-W, la fréquentation 2023 a dépassé les 10.000 visiteurs, dont de nombreux jeunes, preuve de l’évolution des habitudes de consommation.
Du côté des professionnels, des réseaux voient le jour pour accompagner producteurs et vignerons dans la maîtrise des accords fermiers et la communication responsable.
Le Collège des Producteurs wallons a lancé, avec le soutien du Service Public de Wallonie, un module de formation inédit dédié aux professionnels de la filière agroalimentaire. Objectif : jouir d’une meilleure compréhension sensorielle des accords produits/ vins, et savoir “vendre” une démarche responsable.
L’accompagnement inclut aussi l’initiation à l’agro-écologie viticole et à la sélection de produits fermiers compatibles avec une viticulture respectueuse.
Des réseaux sociaux structurés, à l’image de C’est Bon, C’est Wallon, relayent témoignages, recettes, portraits croisés de vignerons et fermiers. Véritable caisse de résonance pour la culture de l’accord responsable, ces communautés réunissent plusieurs dizaines de milliers de followers en Wallonie (source : page Facebook « C’est Bon, C’est Wallon »), accélérant la transition alimentaire au-delà des bornes traditionnelles.
Si les initiatives locales abondent, le défi majeur reste leur pérennisation : la saisonnalité de la production, les coûts logistiques, la diversité encore réduite de l’offre vinicole responsable et la nécessité de formations techniques régulières sont des points de vigilance.
Mais l’élan est là : les consommateurs cherchent désormais le sens dans leurs choix, et la Wallonie prouve que l’innovation peut rimer avec tradition. Grâce à ces collectifs et réseaux, la région s’impose progressivement comme un laboratoire de l’accord mets-vins-responsables au cœur de l’Europe.