Vers une viticulture régénératrice : pratiques innovantes et impacts concrets sur le sol
Face à ces risques, la viticulture wallonne expérimente de nouvelles voies, dans le sillage de la transition écologique et des exigences des consommateurs pour des produits durables. Voici les tendances qui marquent actuellement l’évolution des sols viticoles wallons, avec leur lot de bénéfices – et de défis.
La couverture végétale : moteur de biodiversité et de protection
La moitié des vignobles wallons plantés après 2015 privilégient désormais l’enherbement total ou partiel (source : Vitinéo, 2022). Laisser pousser un couvert végétal entre les rangs – trèfles, graminées, fleurs locales – présente de multiples avantages :
- Stabilisation du sol et réduction de l’érosion : un sol couvert perd 80% de moins de particules par ruissellement qu’un sol nu (source : Agroscope, 2017).
- Stimulation de la vie microbienne : les racines exsudent des sucres, nourrissant bactéries et champignons bénéfiques.
- Effet « pompier » en cas de fortes pluies : la structure racinaire absorbe l’excès d’eau.
L’enherbement peut cependant concurrencer la vigne sur l’eau et les nutriments par temps sec. De nombreux vignerons optent alors pour un enherbement alterné : une rangée sur deux, ou des couverts végétaux temporairement gérés selon la météo.
Le retour de la matière organique : composts, bois raméaux et couverts hivernaux
Dans un vignoble, la matière organique, c’est l’assurance d’une “soupe” biologique vivante. De plus en plus, les restes de taille, bois broyés et composts locaux remplacent les engrais chimiques. Une expérience menée au Domaine du Chenoy entre 2017 et 2021 a montré qu’un apport annuel de 10 tonnes/ha de compost issu des déchets verts permet d’augmenter le taux de matière organique de 0,3 points en 3 ans, tout en boostant l’activité des vers de terre (révélée par un doublement des galeries/m², source : Bulletin Wallon de Viticulture, 2022).
- Dynamisation du cycle de l’azote et du phosphore (libération lente, disponibilité accrue pour la vigne)
- Meilleure rétention d’eau, résistance accrue aux périodes sèches
- Stimulation de la microfaune – nématodes, collemboles – et, à long terme, création d’agrégats stables
Travail du sol raisonné : réduire la compaction et renforcer le terroir
Adieu charrues lourdes et passages répétés ! Le non-labour ou le travail superficiel du sol se généralisent, aidés par des outils modernes (interceps, lames bineuses). Moins profond (5-10 cm), il limite la déstructuration du sol et encourage la stratification naturelle. Ce choix a pour effet :
- Moins de compaction : sur sols limoneux, la densité du sol est réduite jusqu’à 17% en 4 ans (source : CRA-W, projet Optisol, 2021).
- Mieux préserver la faune, notamment les lombrics essentiels à l’aération et au drainage naturel.
- Favoriser la mycorhization, indispensable pour un ancrage racinaire profond et l’expression des arômes du terroir.
Viticulture biologique et biodynamique : quelles différences pour le sol ?
Plus de 18% des surfaces plantées en Wallonie sont désormais en bio (source : SPF Santé publique, rapport 2023). Les principes reposent sur l’exclusion totale des produits de synthèse, mais aussi sur des pratiques qui investissent dans la vie du sol :
- Utilisation d’infusions de plantes stimulantes (prêle, ortie), pour activer les processus biologiques naturels
- Apport de préparations biodynamiques (bouse de corne, silice), aux effets reconnus sur la structure et la fertilité du sol (source : études ITAB, 2021)
- Rôle-clé de la rotation des cultures et des haies – pour abriter des auxiliaires et casser la monotonie microbienne
L’impact le plus évident : des sols retrouvant leur structure grumeleuse, un microbiote diversifié, une moindre érosion. Les vignerons bio observent aussi des vignobles plus résilients lors des canicules récentes (été 2019-2020), la couverture organique jouant un rôle d’isolant contre la surchauffe.